Citroen C4 Le Mans - Copyright 2010
Trois tours historiques pour une Citroën au 24 Heures du Mans.
Nous sommes le dix huit juin 1932. Il fait chaud, très chaud. L’heure se rapproche rapidement de quatre heure de l’après midi. Henri de la Sayette, 27 ans, se tient sur le comptoir de stand de la voiture n°19, regardant anxieusement Charles Wolf en train de terminer les réglages avant de démarrer la voiture. La voiture est une Citroën « C4 Roadster » et ils sont sur le point de commencer la fameuse course des 24 heures du Mans. La seule Citroën à avoir couru au Mans jusqu’à ce jour.
Raymond Sommer dans l’Alfa n°8 dans le stand d’à côté a salué Henri avant d’aller s’installer sur la grille de départ. Hellé Nice, qui était là pour le week-end, est passée comme une flèche et les a embrassé tous les deux en leur souhaitant « bonne course ». Juste en face d’eux, déjà sur la grille de départ, dans la Bugatti n° 16, se tient Ernest Friderich, un ami de longue date et bras droit d’Ettore Bugatti, mais aussi concessionnaire Bugatti à Nice ; il doit penser à sa fille Renée qui s’est tuée 4 mois plus tôt, à Pougues Les Eaux, dans la partie escalade du Rallye de St Raphael, elle aurait probablement couru au Mans. Mais c’est le sort des coureurs à cette époque.
Henri de la Sayette on pit wall in plus fours with Charles Wolf in white overalls ( back to us), working on the Citroën which is hidden behind Bugatti no 16.
Enfin, la Citroën court. Charles fait quelques réglages, ferme le capot et serre les sangles. « Bon, allons y, vite ! » crie Henri, et Charles avance la Citroën sur le circuit, en longeant quelques unes des voitures et en s’installant en marche arrière vers la place qui lui est dédiée sur la grille de départ, puis il en sort. Henri le rejoint et ils échangent quelques mots tout en épongeant leur front, « tu n’as pas oublié ceci ? » « as-tu fais cela ? » …
C’est ensuite le tour d’Henri de rejoindre son stand avec les autres, à l’exception des pilotes, y compris Charles Wolf, qui traversent la piste et prennent position en face de leur voitures respectives.
Juste avant quatre heures, une minute de silence est demandée à la mémoire d’André Boillot (un célèbre et très talentueux pilote français) qui s’est tué la semaine précédente sur un autre circuit.
Une fois le silence terminé, la foule se presse contre la clôture pour voir le lever de drapeau, mais certains pilotes ayant anticipé le départ, on leur fait signe de revenir en arrière. Une seconde fois ils se mettent à courir trop tôt et sont rappelés à l’ordre. Enfin, le directeur de course finit par crier « Partez! » et abaisse sont grand drapeau jaune et les pilotes se ruent vers leurs voitures, enjambent les potières et pressent leurs démarreurs. Dans un vrombissement de moteurs ils s’élancent un peu dans tous les sens vers le premier virage.
Charles, pas très rapide pour rejoindre sa voiture, démarre assez vite et sa voiture a une bonne position. La poussière est épouvantable, près de la passerelle. Il double une Alfa, mais est de nouveau doublé par la même voiture. Puis, dans les esses, il double la Caban qui semble ralentir.
En approchant de « Maison Blanche », il voit une grande voiture sur le côté, roues tournant dans le vide, rejetant de la vapeur et un homme essayant de la pousser sur le côté. On ne peut pas voir le pilote.
La course passe devant les stands et il fait signe à Henri que tout va bien. Une Bugatti sortie de nulle part apparait à côté de lui alors qu’il avance tranquillement – d’où venait elle ? Dans les esses, la Bugatti commence à s’éloigner. « Je dois le suivre, sinon je vais me retrouver derrière », pensa Charles. Il voit la Caban stationnée à côté de la « ligne droite des Hunaudières ». Lorsqu’il passe de nouveau la « Maison Blanche », il y a des hommes qui essayent de tirer la Bentley avec une corde. Dans les stands, il y deux autres voitures arrêtées pour des réparations. Un autre tour. Il se débrouille pour garder la Bugatti en vue. Ils essayent toujours de tirer la Bentley hors du circuit dans un champ. Encore un autre tour.
Puis les esses, autour du « tertre rouge » et vers les « Hunaudières ». Tout d’un coup, dans le bruit du moteur sous pression, un click et un bruit sourd, et la voiture commence à avoir des ratés. « Merde, merde, merde ! » Jure Charles, alors qu’il essaye de reprendre en main la voiture pour aller jusqu’aux stands.
La voiture avance en roues libres pour s’arrêter sur le côté de la piste et Charles saute hors de la voiture. Des hommes arrivent pour l’aider, mais il est le seul à avoir le droit de toucher au moteur de la voiture, et ils ne doivent pas la toucher. Il défait les sangles et ouvre la capot – désastre – quelque chose est cassé!
Et voilà, il n’a rien pour réparer ou pour la remplacer ! Il est complètement découragé, il autorise les hommes à pousser la voiture dans le champ, pour la sortir du circuit, et s’assoit sur le sol à côté de la voiture, alors qu’un mélange d’adrénaline et de fatigue lui montent à la tête. « Mon Dieu – çà y est – c’est terminé » dit il aux personnes venues l’aider. Deux d’entre eux regardent le moteur et confirment en haussant les épaules, et ils retournent regarder la suite de la course, laissant Charles seul avec la Citroën d’Henri.
Ainsi se termine la course et les rêves d’Henri de la Sayette et de Charles Wolf. Etre en compétition avec les meilleurs d’Europe dans une des plus difficiles courses automobiles. Une simple défection qu’ils n’ont pas pu réparer.
Les faits :
En 1932 le circuit a été réduit à 13.5 kilomètres. 32 voitures ont été inscrites dont 26 voitures ont pris le départ - quelques Alfas, une Talbot, 3 Aston Martins, 4 Bugattis, une Amilcar, une Caban Special, une Salmson, une MG, une Mercedes-Benz, une Stutz, une B.N.C., une Rally N.C.P., une Bentley, et une Citroen.
Raymond Sommer et Luigi Chinetti ont gagné dans une Alfa Romeo 8C 2300 LM, avec un tour moyen de 123 km/heure.
Le tour le plus rapide a été réalisé par Ferdinando Minoia dans une Alfa à 142 km/heure – mais il n’a fait que 22 tours et a été accidenté.
Il y avait seulement une femme pilote cette année - Odette Siko dans une Alfa Romeo 8C 1750 conduisant avec Louis Charaval qui arrivèrent 4ème du classement général et gagnèrent dans leur catégorie.
Seulement 9 voitures ont fini la course.
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